On constate couramment que les adultes ont plus de facilité à reconnaître des visages de leur propre type ethnique en comparaison à des visages appartenant à d’autres types. Une des explications de ce phénomène est l’hypothèse de contact : une forte exposition à une catégorie de visages depuis la petite enfance. Les nourrissons devraient donc moins être sensibles que les adultes à cet effet.

Il a été suggéré que les enfants possèdent à la naissance un potentiel de perception et de traitement des visages qui se développe avec l’expérience. Le système présent durant la première année de vie serait très général puis l’environnement façonnerait le traitement du visage. Nous avions déjà montré que si les nourrissons de 3 et 6 mois étaient capables de reconnaître des individus dans tous les types de visages (Africain, Chinois ou Européens), les enfants de 9 mois, par contre, ne reconnaissent que les visages de leur propre type, comme les adultes. L’expérience précoce avec les visages présents dans l’environnement a donc façonné la représentation des visages du nourrisson et a limité ses capacités de reconnaissance. Cependant, cela ne signifie pas que le système soit figé. En effet, deux études ont montré que des enfants adoptés au cours de l’enfance dans une ethnie très différente en terme de visage apprenaient rapidement à différencier et à reconnaitre les visages de leur nouveau groupe.
Nous nous sommes donc intéressés à savoir si l’on pouvait maintenir cette capacité à reconnaître tout type de visage. Dans cette étude, publiée dans PlosOne, nous avons montré des visages Chinois à des enfants de types Européens  régulièrement entre l’age de 6 et 9 mois. Lorsque nous avons testé leur capacité de reconnaissance de visages Chinois à 9 mois, les nourrissons sont toujours capables de les reconnaître.  Notre étude a permis de montrer qu’une exposition artificielle d’environ 1 heure par jour sur une période de 3 mois permet de conserver la capacité à reconnaître les visages de visages de type différents chez le nourrisson, le même type d’exposition n’est pas suffisant pour des adultes.  Il est maintenant nécessaire de déterminer pendant combien de temps cette influence perdurera.

Pour en savoir plus : voir l'article paru dans le numéro du 18 mai 2011 dans la revue Plos ONE.